Intelligence et contagion émotionnelles

10 DÉCEMBRE 2019

Véritable science qui se développe depuis ces dix dernières années, l’intelligence émotionnelle définit la capacité à reconnaître ses émotions, celles des autres et comment les utiliser pour guider sa pensée et ses actes. Comprendre les mécanismes émotionnels dans l’entreprise devient, aujourd’hui, un principe de management essentiel. 

Pour Christophe Haag, référence sur ce sujet, chercheur et professeur en comportement organisationnel à emlyon business school : « Colère, tristesse, peur, joie, toutes les émotions sont positives dans le sens où elles portent toutes une information! Il est donc important de savoir les comprendre, tout en étant capable de les réguler... ». « L’intelligence émotionnelle contribue à la performance, assure un bon fonctionnement social et est fortement liée au bien-être. Ne pas se laisser submerger par elle et l’utiliser positivement, permet de développer des relations humaines satisfaisantes, de prendre de meilleures décisions et de bien gérer son stress », poursuit Lise Peillod-Book, fondatrice du cabinet Résonances Consulting.

Pour évaluer les émotions et éviter un débordement souvent néfaste, Lisa Bellinghausen, directrice du cabinet Qualia Conseils, a développé, avec emlyon business school, le test QE Pro qui permet l’évaluation de la performance émotionnelle des managers et des dirigeants. « L’objectif est d’identifier et de décoder ce que ces managers et dirigeants ressentent, comprendre pourquoi telle émotion déclenche telle manifestation… Pour, au final, faire de ces émotions, une ressource », explique-t-elle. Et de préciser : « Cette intelligence émotionnelle peut se développer tout au long de la vie, par l’expérience, mais aussi grâce au coaching ou à la formation. »

 

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« La révolution affective gagne du terrain » 3 questions à Christophe Haag, Professeur en comportement organisationnel, chercheur, auteur et conférencier.

Les entreprises sont-elles prêtes à faire de la place pour la prise en compte des émotions ? Certaines le sont plus que d’autres. Mais « la révolution affective » gagne du terrain.

Pour preuve, le test d’intelligence émotionnelle spécifiquement dédié aux managers et dirigeants, QE Pro, que nous avons créé à emlyon business school, ainsi que les programmes de coaching et de formation qui lui sont rattachés, connaissent une croissance fulgurante depuis trois ans. Et, inversement, sentez-vous que les dirigeants et managers souhaitent « montrer » leurs émotions dans leur cadre professionnel ?

Les accepter et les considérer est déjà un premier pas. Les montrer, quand on est manager, est nécessaire si l’on souhaite embarquer ses équipes. 50 à 70 % du climat émotionnel d’une équipe est directement influencé par les émotions que dégage le chef...

En quoi l’acceptation des émotions permet-elle le mieux vivre en entreprise ? Accepter ses émotions, c’est être aligné avec soi-même ce qui permet un équilibre psychique protecteur. Aussi, accepter les émotions « entrantes » permet de mieux s’adapter à son environnement de travail.

De l’empreinte à la contagion émotionnelle

Au delà de l’intelligence émotionnelle, la contagion émotionnelle est un transfert d’émotions d’un individu à l’autre. On peut comparer cela à la contagion par un virus qui agit en quelques millièmes de seconde. Lors d’une rencontre avec quelqu’un, par exemple, on a tendance à adopter automatiquement ses expressions, ses  comportements.

Ce mimétisme, immédiat et inconscient est une composante fondamentale des rapports humains. « Neuf inquiétudes sur dix sont totalement infondées et nous touchent plus qu’elles ne le devraient. Le cerveau se fait avoir « comme un bleu » face à ces émotions et met en place tout un mécanisme extrêmement énergivore qui peut même engendrer des troubles physiques (insomnie, perte d’appétit). C’est dans ces circonstances que ces émotions deviennent toxiques. Plus l’émotion est intense, plus elle est toxique et plus elle va avoir un pouvoir de contagion important » explique Christophe Haag.

Et Thierry Boiron, Président des Laboratoires Boiron, d’ajouter : « Le chef d’entreprise doit réfléchir à l’empreinte émotionnelle qu’il a envie de transmettre. Il doit prendre conscience de son état émotionnel pour le partager correctement. Ce qui est négatif, ce n’est pas l’émotion, mais c’est de se laisser déborder par cette émotion quelle qu’elle soit ».

La scène est rapportée par Lise Peillod-Book : « Un manager entre dans une salle de réunion avec ses commerciaux alors que les chiffres ne sont pas bons. La réunion se passe mal, le manager est dans une colère mal maîtrisée, qui le dépasse. Ils ressortent de la réunion eux aussi en colère, puis s’invectivent entre eux. C’est là que la contagion émotionnelle intervient, ce qui aura, au final, pour effet de réduire encore la performance des commerciaux à cause de leur mal-être. »

 

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emlyon business school propose une formation certifiante 100% online « Développer son intelligence émotionnelle » ayant pour objectif de :
• Diagnostiquer son propre état émotionnel ainsi que celui d’autrui
• Mettre en place une tactique émotionnelle afin de favoriser l’épanouissement personnel et collectif et la performance managériale.

en savoir plus

La contagion émotionnelle peut être positive ou négative

Chaque émotion, si elle est détectée et mesurée, a une répercussion sur notre efficacité. « On sait aujourd’hui que des émotions spécifiques soutiennent des performances spécifiques. Le stress modéré peut être, par exemple, une véritable source de créativité » précise Lisa Bellinghausen. « Je crée, volontairement et en adhésion avec mes équipes, un climat de stress modéré pour booster leur créativité. Mais, je reste parfaitement transparent sur l‘intention auprès de mes équipes »
avoue, quant à lui, Thierry Boiron.

La contagion émotionnelle peut aussi se constater, hors de l’entreprise. Ainsi, la situation actuelle autour du remboursement de l’homéopathie en est un exemple. Après
plusieurs mois de polémique, Thierry Boiron, rapporte avoir dû faire face, ces derniers temps, à une véritable contagion émotionnelle en interne : « La crise que nous
vivons a contaminé l’ensemble de l’entreprise, créant un climat d’inquiétude. Dans un cas comme celui-ci, le chef d’entreprise doit accepter les émotions de ses collaborateurs. Il est important de pouvoir repérer les signaux faibles pour recycler positivement ces émotions. »

Article rédigé par Tribune de Lyon